Attentats : l'extraordinaire mobilisation des hôpitaux franciliens

La Rédaction • mis à jour le
DOSSIER : Les 201 métiers de l'hôpital

Spontanément, ils sont revenus travailler dans la nuit de vendredi à samedi 14 novembre quand ils ont appris que des attaques terroristes étaient en cours à Paris. Médecins, infirmiers, aides-soignants…, tous mobilisés dans la situation terrible de "médecine de guerre". Des professionnels qui auront besoin, eux aussi, d’un soutien psychologique.

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Vendredi 13 novembre 2015. Dès la nouvelle des attentats confirmée, le centre de crise sanitaire du ministère de la Santé est activé. Le "plan blanc" est déclenché : tous les établissements hospitaliers d’Ile-de-France se préparent à accueillir un nombre important de blessés. Ce plan blanc, déclenché en cas de situation exceptionnelle, entraîne l'arrêt des interventions chirurgicales programmées et l'apport de matériels et médicaments supplémentaires. Les hôpitaux rappellent leur personnel, les praticiens hospitaliers devront rester sur place entre les relèves d'équipe... A la Pitié-Salpêtrière, par exemple, les effectifs sont passés de 15 à 80 médecins. Beaucoup seraient revenus travailler spontanément.

L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) lève le plan blanc, lundi 16 novembre, à 17 heures, et met en place un soutien psychologique pour ses personnels.

Martin Hirsch, directeur de l’AP-HP, adresse ce message aux personnels : "A la suite d’échanges ce lundi 16 novembre avec des représentants du personnel, nous avons partagé le constat que ce type de prises en charge, inhabituelles, relevant de situation de guerre, peut engendrer un état de souffrance psychologique chez les personnels qu’il convient d’identifier et d’essayer de traiter dans les meilleurs délais. Une équipe de psychologues cliniciens et de psychiatres, formée à la prise en charge des psychotraumas, assure dès aujourd’hui et dans les jours qui viennent des debriefings d’équipe (prise en charge collective) dans les services directement impactés."

Témoignage

 

"On a souffert, on en a discuté et on va encore en discuter..."

François Lecomte, médecin de l'hôpital Cochin, à Paris (14e), enchaîne les gardes depuis les attentats djihadistes du 13 novembre. Il raconte à 20Minutes.fr comment son équipe médicale vit cette épreuve ? "On est habitués à des situations très difficiles [...], assure-t-il, mais là, il y avait une espèce d’angoisse, une épée de Damoclès, on ne savait pas si on allait avoir 20, 50 ou 100 patients. Il y a eu des moments de solitude [...]. On a souffert, on en a discuté et on va encore en discuter, et on va se préparer car on pense qu’il y aura probablement autre chose. Peut-être qu’il y en aura parmi nous qui auront aussi besoin d’un soutien psychologique, mais ils peuvent compter sur nous pour les aider, les dépister, les orienter vers des services de médecine du travail avec des psychologues."

 

Les CMUP, cellules d’aide psychologique aux victimes

Les cellules d’urgence médico-psychologiques (CUMP) des victimes de catastrophes, d'attentats et d'accidents collectifs ont été créées en juillet 1995, après l’attaque terroriste de la station parisienne du RER Saint-Michel.

Il y en a 100, une par département. Celle de Paris travaille avec le SAMU. Samedi matin, elle fait appel à des renforts devant l’afflux de personnes en état de choc. Ces cellules d’urgence médico-psychologiques ont été installées sur plusieurs sites parisiens pour accueillir les victimes et leurs familles. L’ensemble des établissements de santé disposant d’un service d’accueil d’urgence, les SMUR et SAMU sont mobilisés, de même que l’Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus)(( L'une des missions de l'Eprus est de recruter et former des professionnels de tous les secteurs de la santé,"volontaires pour être contactés en cas de besoin de renforts dans un établissement de santé, une agence régionale de santé, une administration ou encore une ambassade.Ces volontaires sont appelés des "réservistes".)). Tous les personnels de l’Etablissement français du sang sont là pour répondre à cette situation d’urgence et à l’afflux de donneurs.

Dans les hôpitaux, une "médecine de guerre"

Les urgences de l’hôpital Bichat ont reçu 15 blessés graves. C’est un hôpital particulier, formé depuis plusieurs années à la médecine de guerre. Un hôpital et des personnels qui ont su faire face les 13 et 14 novembre à l’afflux de blessés graves, présentant de nombreuses plaies par balle à l’abdomen.

"On savait tous que cette possibilité était réelle et que notre rôle était de nous préparer. On a la preuve que le fait d’avoir travaillé sur des choses qui nous paraissaient parfois abstraites, c’était très important et qu’on était capables de le faire", explique le docteur Myriam Ismaïl au micro de FranceTVinfo. A son poste, cette femme médecin raconte : "Il y a des amis dont on ne sait pas où ils sont. On est concernés, mais on est quand même là. J’habite le XIe arrondissement, c’est à deux rues de chez moi." Le stéthoscope autour du cou, en cette nuit terrible, elle se dit "triste et en colère".

Cela fait 4 ans que le chef de service a formé ses troupes à la médecine de guerre. Après les blessés graves, ceux touchés par les débris envoyés par les explosions des kamikazes : des bouts de projectiles un peu partout. Des gens en état de choc, qui sont rentrés chez eux avant de retourner à l’hôpital, s’apercevant qu’ils étaient blessés.

"44 ans d’hôpital public… Je n’avais jamais vu ça"

Le professeur Denis Safran est chef du service anesthésie-réanimation de l’hôpital Georges Pompidou. Il est entré avec les policiers de la Brigade de recherche et d’intervention (BRI) dans le Bataclan. Il raconte au micro de France2 : "Je n’avais jamais vu ça […] Je suis arrivé avec la BRI, car je suis médecin de soutien opérationnel, avec la colonne d’assaut, on a vu tous ces gens qui étaient couchés par terre mélangés […] les morts, les blessés, les blessés qui appelaient au secours […] sans savoir où étaient les preneurs d’otages […]. En 44 ans d’hôpital public, jamais vu cela, des gens gravement blessés jamais en aussi grand nombre […]nous sommes dans le cadre de la médecine de guerre, de la médecine balistique, avec un tri et des priorités pour sauver ceux qui sont "sauvables"…"

"C’était horrible", raconte l'un des chirurgiens de l’hôpital Lariboisière

On les appelle les trauma-centers, ce sont les seuls hôpitaux capables de soigner les polytraumatisés. Il s’agit de Beaujon, Lariboisière, Pompidou, Bichat et La Pitié-Salpetrière. C’est là que les 99 blessés en "urgence absolue" ont été soignés vendredi soir. Les 352 blessés, eux, ont été envoyés vers les 17 services des urgences de Paris et d’Ile-de-France. Beaucoup de victimes sont arrivées sans papier, inconscientes ou dans le coma. Un numéro sur le front pour toute identité. "La plupart des blessés avaient été traversés de balles, c’était horrible", raconte l'un des chirurgiens de l’hôpital Lariboisière. Mâchoires, crânes, yeux, membres touchés, égrène-t-il, en évoquant "un grand sentiment de désolation". D'autres hôpitaux sont moblisés, par exemple les hôpitaux militaires Percy et Bégin : 58 blessés pris en charge.

En 4 jours, les hôpitaux ont pris en charge 415 personnes

Depuis les attentats du 13 novembre, les hôpitaux de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris ont pris en charge 415 personnes. Une centaine de plus qu’à J+3. La plupart sont des "personnes impliquées" — en état de choc psychologique— qui se sont présentées spontanément dans les hôpitaux.

Sur le site de l’AP-HP, on pouvait le 17 novembre lire ce bilan : sur les 80 personnes admises le 13 novembre 2015 en situation d’urgence absolue :

  • 35 personnes ne relèvent pas ou plus aujourd’hui d’une surveillance intensive en service de réanimation,
  • 42 personnes sont toujours en service de réanimation,
  • 3 personnes sont décédées.

Dix hôpitaux de l’AP-HP ont accueilli ces urgences absolues, principalement les hôpitaux Pitié Salpétrière, HEGP, Saint-Antoine, Lariboisière, Henri Mondor. Sur les 415 personnes prises en charge depuis vendredi soir dans les hôpitaux de l’AP-HP, 218 personnes sont retournées chez elles.

Remerciements

 

Marisol Touraine salue un "magnifique engagement"

La ministre de la Santé, Marisol Touraine (photo), a salué le 16 novembre "la prise en charge parfaite des victimes" des attentats de vendredi, remerciant "au nom du gouvernement" l'ensemble des personnels hospitaliers franciliens, dans un courrier. "Tous, médecins, personnels soignants et administratifs, vous avez fait preuve d'un professionnalisme exemplaire", a écrit la ministre dans une lettre adressée aux agents de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris et des établissements d'Ile-de-France ayant participé à la prise en charge des blessés.

"Tous les personnels de santé peuvent être fiers de cette mobilisation et de la réponse apportée par notre système hospitalier", s'est félicitée la ministre, estimant que "la prise en charge des victimes (avait) été parfaite". "Je vous remercie toutes et tous, en mon nom et au nom de tout le gouvernement, pour votre magnifique engagement", a-t-elle ajouté.

 

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